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PLUS VRAI QUE NATURE !
Livraison du premier
entraîneur de vol Fennec au CIEH «Target
à 10 heures haut», «tally-ho», l’équipage effectue un virage
relatif, se présente en patrouille serrée, effectue les mesures de
reconnaissance à vue, puis tente d’arraisonner l’appareil. Devant son
refus d’obtempérer, l’autorisation de tir de semonce est donnée. Les
obus traçants sifflent. L’intercepté n’en tient pas compte et le tir
de destruction est ordonné par la Haute autorité de défense aérienne.
Le réticule de visée oscille un peu, se stabilise, les obus claquent,
l’appareil ennemi explose en vol…Mission accomplie. Il
ne s’agit heureusement que de simulation. Elle est pourtant tellement réaliste
qu’on s’y croit : on
simule sans faire semblant ! Vol
en patrouille, tir canon air-sol ou air-air, mission SAR[1],
vol sous jumelles de vision nocturne le dernier né de la simulation dans
l’armée de l’air sait tout faire : c’est l’entraîneur de
vol Fennec livré au CIEH 00.341 «Maurienne». Il est l’aboutissement d’un long programme, dont les premiers contours ont été esquissés en mars 1991 par le Lcl LEVEL dans une thèse de BTEM[2]. Les projets de fiche-programme se succèdent mais se heurtent toujours à une difficulté majeure : le rapport du coût d’un simulateur et d’un Fennec. De manière parallèle, Thomson Training & Simulation (TT&S)[3] développe de son côté «l’helitrainer», un entraîneur fondé sur une cabine fixe ressemblant à l’Ecureuil, un modèle de vol représentant un hélicoptère générique[4] et un visuel projeté sur une portion de cylindre de 140°X50°.
Après
évaluation de la restitution permise par une cabine sans mouvement face
à un visuel de qualité, la fiche d’expression de besoin se précise :
le mouvement est délibérément sacrifié sur l’autel des capacités
visuelles et tactiques. L’effort doit porter sur la simulation du cadre
tactique. La FAP doit disposer d’un moyen de simulation moderne lui
permettant d’instruire puis d’entraîner ses équipages d’hélicoptères
légers aux missions opérationnelles
qui lui sont assignées : MASA[5]
de jour et de nuit, SAR, tir canon, navigation tactique sous jumelles de
vision nocturne Quittant
depuis peu l’escadron d’hélicoptères «Parisis» le Cdt SANSU connaît
parfaitement les missions de défense aérienne et de SAR sur Fennec.
Affecté à l’état-major de la Force aérienne de projection, il
reprend, modifie, complète la fiche d’expression de besoin et se montre
si convainquant que le programme enfin semble se concrétiser. Plusieurs
industriels s’affrontent pour répondre à l’appel d’offre que TTS
emporte fin 2000. L’enjeu est important car il s’agit de fabriquer 4
entraîneurs au profit des unités de la FAP auxquels viennent par la
suite s’ajouter un puis deux exemplaires pour l’ALAT. Après
les premiers développements industriels, les membres d’une équipe intégrée
regroupant l’équipe de marque simulation du Centre d’expériences aériennes
militaires et les utilisateurs emmenés par l’Officier d’utilisation
opérationnelle Fennec se retrouvent à Cergy pour mettre au point le modèle
de vol, le visuel, valider l’interface homme machine du pupitre
instructeur, le cadre tactique… De longues heures de travail, de réunions,
d’essais pour une livraison du premier exemplaire à Toulouse au mois
d’octobre 2002. Un autre exemplaire est livré depuis fin janvier 2003
à Metz au sein de l’EH 02.067 «Valmy». Les autres entraîneurs seront
livrés dans les mois à venir à Villacoublay au sein de l’EH 03.067 «Parisis»,
puis à Cayenne au sein de l’EHOM 00.068 «Guyanne» et au Luc au sein
de l’ALAT L’entraîneur Fennec est donc un outil destiné à la formation et au maintien en condition opérationnelle des équipages MASA. Il permet de simuler de manière très réaliste des interceptions d’aéronefs lents (hélicoptères, avions légers, Ulm, ballon…) tout en respectant la hiérarchisation des mesures actives (reconnaissance à distance, identification, escorte, destruction…). L’appareil intercepté obéit à une trajectoire qui peut aller de l’automatisme au pilotage complet par l’instructeur qui dispose d’un mini-manche et d’une manette des gaz. Une provision «calculateur» est prévue pour rétrofiter les entraîneurs de Villacoublay et de Cayenne avec la caméra thermique dès que ce cet équipement sera monté sur le Fennec. La virtualité collera toujours au réel !
Le
tir canon est restitué par un logiciel qui calcule la balistique des obus
en fonction des paramètres de l’hélicoptère (logiciel hérité des
programmes de simulation Mirage F1 et 2000). On peut tirer en mode air-sol
ou en mode air-air. Les résultats de tir sont disponibles comme lors des
entraînements sur les cibles SFENA du champ de tir de Captieux. La qualité
de la simulation permettra de former les tireurs canon et de maintenir la
qualification. L’entraîneur
permet le vol de jour, de nuit (avec une restitution remarquable des halos
des phares) et sous JVN. Ce dernier s’effectue avec de vraies jumelles
de vision nocturne. Les phases de vol sous JVN sont unanimement reconnues
comme quasi-parfaites. Une zone allant de Toulouse à Biarritz est
enrichie par des éléments 3D[6]
(maisons, arbres, pylônes…) afin de permettre la navigation tactique
basse altitude. Enfin,
un figuratif associé à une balise de détresse peut être positionné
dans la base de données visuelles. Un calcul d’intervisibilité entre
la balise et les récepteurs Homing[7]
à bord de l’hélicoptère permet de restituer précisément la
recherche d’un appareil accidenté au cours d’une mission SAR :
les masquages liés aux obstacles ou au relief rendent l’exercice extrêmement
réaliste. Le visuel
constitue incontestablement le point capital du programme C’est sur lui
que repose la qualité de la restitution en l’absence de mouvement. Sa
fréquence de rafraîchissement des images (50 Hz contre 25 Hz
habituellement) comme leur résolution (3 minutes d’arc) en font le
meilleur visuel mis en service en France. Le modèle de vol de l’entraîneur a été affiné par l’OUO Fennec qui a obtenu de manière très empirique un réalisme pourtant remarquable. La qualité de ce modèle de vol permet d’exécuter avec réalisme les procédures de secours Fennec et ouvre donc la voie à une utilisation de cet entraîneur pour la délivrance de la qualification de type (QT) dès l’homologation par la DGAC. Parallèlement le positionnement des balises de radionavigation autorise la formation au vol IFR au CIEH et le maintien en condition dans les unités dotées.
Si
ceux qui ont déjà eu la chance de tester l’entraîneur se sont laissés
prendre au jeu de la destruction des cibles, mieux que dans «Combat
Flight Simulator 1, 2 ou 3..», les jeunes stagiaires qui débutent leur
formation au CIEH par une petite dizaine de séances virtuelles savent
qu’ils ne sont pas à la fête : ce n’est pas non plus une super console
Nitendo, mais bien un moyen d’instruction particulièrement performant ;
un hélicoptère virtuel certes, mais surtout un générateur de sueur
bien réel. [1] Search And Rescue : recherche et sauvetage de naufragés [2] Brevet Technique d’Etat-major [3] devenu depuis Thalès training & simulation [4] qui se comporte comme un hélicoptère sans représenter d’appareil précis [5] Mesures Actives de Sûreté Aérienne [6] 3D : en trois dimensions, qui restituent donc des volumes, une profondeur de champ [7] Homing : instrument à bord de l’hélicoptère qui permet la localisation d’une balise de détresse en donnant la direction de l’émission. |