24 heures

                            à BOU-HAMAMA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

-Février 1961-

 Hier nous nous sommes réveillés avec quelques centimètres de neige fraîche. Ce matin elle avait disparu, mais le froid était toujours présent, avec un ciel couvert au dessus des six H34 « Cargos » et du « Pirate » (H34 de protection et d’appui armé d’un canon de 20mm alimenté par bandes d’obus explosifs traçants et de deux mitrailleuses lourdes de 12,7mm, l’ensemble servi par deux mitrailleurs) du D.I.H. (Détachement d’Intervention Héliporté) de Bou-Hamama, quelque part au pied du Massif des Nementchas.

Réveil matinal après la nuit passée sous les grandes tentes qui servent de dortoirs. Il n’y fait pas très chaud malgré le poêle, bricolé par la mécanique, au fonctionnement capricieux qui « carbure » à l’huile de vidange des moteurs de H34.

Après s’être extrait avec difficulté de la tiédeur du sac de couchage en duvet (avec couverture additionnelle) placé sur le lit pliant en toile, direction un rapide petit déjeuner sous la tente « mess », suivi d’une non moins rapide toilette à faire honte à un chat.

Briefing pour tous les équipages sous la tente OPS en prévision d’un héliportage d’assaut dans la matinée, précédé d’une mise en place à une demi-heure de vol du camp, là où stationnent les troupes à embarquer.

Mise en route, décollage, et après un vol paisible, nous nous posons à proximité du Poste de Commandement de l’opération où il est prévu d’emporter huit commandos par appareil. Mais après une ou deux heures d’attente, l’héliportage est annulé.

Pendant ce « standby », comme il faisait plutôt frisquet, un petit malin eut l’idée de faire chauffer une gamelle d’eau sur un feu de bois (ou de 115/145 ?) entre deux pierres, afin d’y incorporer du café soluble en provenance de nos boîtes de rations.

Quand ça fume bleu, c'est que c'est cuit...

Avec l’ajout de quelques morceaux de sucre, ce café bien chaud paraissait de bonne augure et d’aucun s’apprêtait à le déguster lorsqu’un problème d’importance se fit jour : pas le moindre verre ou gobelet. Consternation attristée des participants jusqu’à ce qu’un fouineur ne déniche dans la poussière une vieille boîte de pâté vide dont le couvercle, soulevé après l’ouverture, pouvait faire office d’anse. Après un nettoyage approximatif, cette tasse improvisée passa de mains en mains afin de pouvoir déguster le divin breuvage, certains (Oh ! Les difficiles !) préférant s’abstenir.

On peut ainsi, sur une des photos prises ce jour là, voir en pleine action l’Adt D., pilote très sympa, il avait débuté sa carrière dans la chasse sur « Mistral » et avait la particularité de faire partie du « Caterpillar Club » (membres d’équipages sauvés par leur parachute) ayant sauté de son avion en perdition, son « pépin » accroché à une des dérives avant de finir par se détacher. Il en portait parfois l’insigne représentant une « chenille en reptation ».

En fin de matinée, retour à nos tentes pour le déjeuner et, pour la digestion, le soleil ayant fait son apparition, chacun de troquer sa combinaison de vol pour une tenue plus relax afin de s’adonner à la pétanque ou au volley-ball, avant d’entamer une longue soirée d’hiver propice aux tarots, à la lecture ou au courrier. Non sans avoir auparavant effectué un passage au bar, rudimentaire mais convivial, installé par la mécanique à l’entrée d’une tente.

Ainsi se terminait au D.I.H. de Bou-Hamama, une journée à l’activité réduite, assez banale en somme, mais représentative de la vie des équipages d’hélicos sous la tente. Mais toutes les journées n’étaient pas aussi calmes, car dans le même temps, quelque part dans un autre secteur, le Sgt Browne était tué aux commandes de son Pirate.

Récit et photographies de Bernard Mahaut A.H.A.