Le piège blanc
Jean Vincendon et François Henry, apprentis alpinistes d'une vingtaine d'années, veulent à tout prix intégrer le fameux Groupe de haute montagne. Guidés par l'envie d'accomplir un exploit, ils décident le 22 décembre 1956 de gravir le mont Blanc par l'éperon de la
Brenva. Ils ne savent pas qu'ils vont pénétrer dans l'enfer du froid.
|
Les deux jeunes gens rêvent aussi d’un Noël dans la
beauté lumineuse du Mont Blanc.
Leur programme est le suivant :
1er jour : télé du Midi / Fourche
2ème jour : Fourche / Brenva, sortie près des Petits Rochers Rouges si possible, ce serait plus beau… Bivouac peut-être au pied de ces rochers.
3ème jour : descente si possible en faisant le sommet par l’arête des Bosses et le Goûter.
Rien ne sera possible, ils connaîtront dix jours d’errance dans un Mont Blanc qui deviendra leur tombeau.
Après avoir croisé au cours de leur escalade le guide
italien Walter Bonatti, les deux jeunes se perdent durant une tempête. Leur disparition est signalée au bout de quatre jours à la brigade de la gendarmerie de Chamonix. Une opération de sauvetage est alors déclenchée, avec des moyens limités, une météo déplorable et des guides réservés sur une intervention qu'ils jugent
dangereuse; un incroyable imbroglio humain et matériel conduira à un désastre.
|
|
22 Décembre : Jean Vincendon et François
Henry partent de l'Aiguille du Midi pour une escalade hivernale du Mont Blanc par l'éperon de la
Brenva.
26 Décembre 9h00 : pas de nouvelles des deux alpinistes. La brigade de Gendarmerie de Chamonix est avertie mais les conditions météorologiques interdisent toute intervention aérienne ou terrestre.
Une cordée de volontaire s'organise aux ordres de Lionel Terray.
27 Décembre : l'Armée de l'Air engage dans le sauvetage un hélicoptère
H-19 de la Division d'Instruction sur Hélicoptère de la Base École
725 du Bourget du Lac piloté par le Lt Dupret et le Sgt Petetin,
les conditions météorologiques rendront inutiles les deux survols
de la zone.
|
|
|
Après une tentative de poser infructueuse
compte tenu de l'instabilité du manteau neigeux, le H-19 revient
sur les lieux 20mn plus tard et réussi à larguer à 50m des deux
alpinistes des colis et un message leur demandant de se déplacer
200m plus haut dans une zone moins crevassée et donc plus propice
à une évacuation. L'hélicoptère
reviendra donc demain.
|
|
Liaison radio avec l'Ecole de Haute
Montagne |
|
|
28 Décembre : Dès 8h du matin il neige et
toute activité aérienne se trouve bloquée par une voûte de
nuages stagnant à 1900m. Les conditions météorologiques s'améliorent
l'après-midi, l'équipage Dupret - Petetin aux
commandes du H-19 se dirige vers les Houches et avec une bonne
ascendance vers l'aiguille du Goûter et le grand plateau où
durant 40mn en cinq passages ils largueront vivres, duvets,
médicaments, tente iso thermique, boissons chaudes et
réchauds...
... mais il ne repère pas les alpinistes en perdition. |
|
|
|
29 Décembre : le Colonel Nollet organise une opération engageant 2 hélicoptères, le
H-19 déjà engagé et un H-34 piloté par le Commandant Alexis Santini et l'Adjudant
André Blanc accompagnés de 2 guides Honoré Bonnet et
Charles
Germain... (ci-dessous) |
|
|
Aux commandes du H-19 le Sgt
Petetin |
|
|
|
30 Décembre : les conditions météorologiques rendent impossible toute intervention aérienne. |
|
|
31 Décembre : l'opération décidée le 29 est possible à partir de
12h30, Alexis Santini impatient fait activer
l'embarquement. |
|
|
|
|
|
|
31 Décembre : après avoir rejoint la zone
d'intervention, l'approche du H-34 devient délicate, les pilotes
étant aveuglés par la neige poudreuse soulevée par l'appareil...
|
|
|
31 Décembre, 13h10 :... le drame, le Sikorsky
H-34 N°377 s'écrase à proximité des alpinistes au lieu-dit
“La Combe Maudite". |
|
|
|
Henry Vincendon
Germain Santini
Les 4 occupants sont indemnes et
rejoignent les deux alpinistes. Les guides secouristes installent
Vincendon et Henry intransportables dans la carcasse de l'hélicoptère,
le froid est intense -30° et conduisent Alexis Santini et
André Blanc vers le refuge Vallot. André
Blanc se blesse grièvement lors d'une chute dans une crevasse. |
|
|
|
2 Janvier 1957, 14h15 : 2 Alouette II, bloquées par le mauvais temps à Valence, rejoignent Chamonix.
3 Janvier, 9h00 : les Alouette II décollent de Chamonix. |
|
|
9h10, les Alouettes se posent, tour à tour, au refuge
Vallot et évacuent l'équipage du H-34 ainsi que les guides.
La n°13 pilote Jean Boulet
et Henri Petit évacue André Blanc vers
l'hôpital de Chamonix.
La n°7 pilote Gérard Henry
et l'Adjudant Garraud prend Alexis Santini
à son bord. |
|
|
Sur la patinoire de Chamonix,
pour accueillir Alexis Santini épuisé par le
froid intense, sa compagne le médecin Capitaine
Valérie
André.
|
|
|
Alexis Santini conservera
toute sa vie le sentiment de son échec dans cette
mission de sauvetage, alors que c'est tout le système
qui s'est montré défaillant.
L'adjudant André Blanc
transporté sur une civière, à l'arrière plan
Jean Boulet.
10h50, les Alouettes II survolent l'épave du S-58 : aucun signe de vie à bord.
11h30, l'opération de secours est déclarée terminée. |
|
|
19 et 20 Mars 1957 : une expédition redescend les corps des alpinistes
Vincendon et Henry.
"Pris au piège dans la tempête, François
Henry, 23 ans, et Jean Vincendon, 24 ans, se retrouvent seuls, égarés à 4000 mètres d'altitude au mont Blanc. Après dix jours d'errance et de souffrance, alors que
Lionel Terray, héros de l'Annapurna, s'est porté volontaire pour conduire une caravane terrestre, les deux naufragés sont abandonnés dans l'épave d'un hélicoptère qui s'est crashé près d'eux en tentant une
manœuvre désespérée.
Les sauveteurs ont promis de revenir...
Leur calvaire a été suivi à la jumelle depuis Chamonix où l'organisation des secours s'enlise dans d'interminables tergiversations. Les parents, les amis des victimes, la population de la vallée, les touristes, et enfin la presse accourue de tout le pays, assistent abasourdis à cette effroyable affaire.
"Le sort s'est foutu de ces mecs !..." Ce constat du sauveteur Honoré Bonnet résume parfaitement l'enchaînement implacable des erreurs, des défaillances et des malchances qui ont nourri ce drame majeur de l'alpinisme.
Fallait-il mettre en péril la vie de pères de famille pour sauver deux imprudents ? Convenait-il de déployer des moyens considérables pour une opération à l'issue incertaine ? Dans un tourbillon médiatique sans précédent, la polémique a mis aux prises de jeunes grimpeurs citadins animés par la fureur de vivre symbole de leur génération, des guides figés dans leurs traditions et des militaires impuissants devant un ennemi - la montagne - qu'ils n'ont jamais appris à
combattre."
Cette tragédie bouleverse non seulement le grand public mais également l'ensemble des pouvoirs publics et des montagnards. Une nouvelle organisation est nécessaire.
Les sauveteurs seront dorénavant des professionnels, le gouvernement créant une structure placée sous la tutelle de l'Etat -le préfet- constituée de gendarmes,
de CRS et de la Sécurité Civile.
A la fin des années 70, le
glacier des Bossons restitue quelques débris de l'hélicoptère
H-34 58-377 accidenté. Le 28 Octobre 1978, une équipe du CELAG
assistée d'un hélicoptère SA-330 "Puma" de l'Armée de l'Air
entreprend leur récupération:
http://celag.free.fr/museum/tresor/vincen.htm#celag
|
Remerciements au réalisateur Denis Ducroz
pour son film "LES NAUFRAGÉS DU MONT BLANC"
Documents INA, Actualités Gaumont, ECPA, Presse locale et
nationale
Gérard Finaltéri AHA |
|