En
présence entre autres de:
M. Augustin de Romanet,
Président-directeur général du Groupe ADP
Mme Catherine Maunoury, présidente d’honneur de l’Aéro-Club
de France
M. Emmanuel Grégoire, premier adjoint à Mme la Maire de
Paris
M. André Santini, ancien ministre, Maire
d’Issy-les-Moulineaux
Madame le Général,
Madame la Présidente d'honneur, chère Catherine,
Monsieur le Ministre, cher Gabriel,
Monsieur le Ministre, monsieur le Maire, cher André SANTINI,
Monsieur le premier adjoint à la Maire de Paris, cher
Emmanuel GRÉGOIRE,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le Président, cher Augustin DE ROMANET,
Mesdames et messieurs,
Il est des vies si romanesques qu'elles semblent écrites
dans l'encre de l'imagination.
Et pourtant, madame le Général, rien n'est fictif dans le
destin qui est le vôtre.
Le destin d'une femme libre.
Une femme qui refuse que son existence lui soit dictée. Qui
sait ce qu'elle veut, dans une époque qui considérait que
les hommes le savaient mieux qu'elle.
Une héroïne, médecin de guerre, pilote d'avions et
d'hélicoptères.
Un personnage de roman, pour qui chaque chapitre est un
combat.
Strasbourg, 1932.
Vous avez 10 ans. Et vous faites un rêve. Vous êtes un
bolide, fonçant à travers les étoiles, croisant d'autres
bolides. "Ça lui passera", pensent vos parents… A tort.
Pilote, vous le serez, puisque vous l'avez décidé. Obstinée
déjà, vous tracez votre voie. Vous la suivrez, sans dériver.
Abonnée aux Ailes, vos modèles s'appellent Maryse BASTIÉ,
Hélène BOUCHER ou Maryse HILSZ, que vous allez voir atterrir
à l'aérodrome du Polygone. C'est là-bas qu'après le bac,
vous apprendrez à voler, sur un avion Potez.
Mais la guerre arrive, et contrarie vos projets.
Saïgon, 1949.
Il y a quelques mois encore, vous souteniez votre thèse. A
peine diplômée, le doyen de la faculté de médecine de Paris,
le Professeur BINET, vous propose de partir en Indochine.
Et vous voilà médecin militaire, à l'autre bout du monde.
Après l'hôpital de My-Tho, vous êtes affectée au service de
neurochirurgie de l'hôpital Coste.
Les cieux, toutefois, vous rattrapent vite. Votre brevet de
parachutiste donne des idées à votre hiérarchie : vous irez
évacuer les blessés en hélicoptère. Vous obtenez votre
licence de pilote et partez dans les postes les plus
reculés, les marais les plus impraticables, les forêts les
plus inaccessibles, pour ramener des blessés dans les
paniers de votre Hiller. Peu importe la mousson, la boue et
les sangsues. Seuls comptent votre amour de la France,
l'ivresse du pilotage, et le désir de secourir des vies. A
29 ans, vous en aviez déjà sauvé plus de 160.
Boufarik, 1959.
A la chaleur humide de la Cochinchine, succède celle, aride,
des monts du Hodna. Après la jungle, le désert – mais
toujours la guerre. En Indochine, vous étiez isolée ; en
Algérie, vous travaillez en équipe. Après avoir été "la
femme descendue du ciel", vous devenez "la femme qui pilote
un hélicoptère".
Cette fois, vous êtes médecin et pilote à part entière.
Volant sur Alouette et Sikorsky, décollant sous le feu de
l'ennemi, risquant votre vie pour sauver celle des autres,
sereine et sans peur, vous accomplissez 365 missions de
guerres – et autant d'exploits.
Villacoublay, 1976.
Une foule de journalistes vous attend. Nous sommes le 21
avril. Le jour est historique. Pour la première fois, une
femme devient général des armées françaises. Et cette femme,
c'est vous. Je sais : les reconnaissances vous gênent – et
j'imagine combien celle d'aujourd'hui doit vous incommoder.
Mais ces étoiles, vous le savez bien, ne sont pas une simple
décoration. Vous avez fait mentir tous les préjugés, déjoué
tous les déterminismes, renversé le statu quo, repoussé les
limites du possible, et fait de vos rêves une réalité. En
brisant ce plafond de verre, vous montrez à toutes les
femmes de France que rien n'est inatteignable ou
inaccessible. Que rien n'est trop grand, trop difficile,
trop ambitieux pour elles.
Il suffit d'une volonté de fer.
Paris, 2022.
A quelques semaines de votre centenaire, et en cette journée
internationale des droits des femmes, nous voici. En
inscrivant votre nom dans le marbre et sur les cartes, nous
y inscrivons une certaine idée de la liberté. Cette liberté
qui vous a forgée, et avec laquelle vous avez bâti votre
vie.
Rebaptiser cet héliport, c'est un appel.
Un appel à ce que votre courage, votre indépendance, votre
goût de l'impossible inspirent les générations de pilotes
qui s'y poseront. Un appel à ce que votre esprit de révolte
les anime, eux aussi, contre toutes les injustices, tous les
tabous, toutes les traditions dépassées. Un appel à ce
qu'ils soient, comme vous, d'éternels rebelles, jamais
satisfaits, viscéralement Français.
Mesdames et messieurs,
Les hommes n'ont pas le monopole de l'héroïsme.
Pas plus qu'ils n'ont le monopole de l'armée, des médailles,
des postes à responsabilités.
Toute votre vie, madame le Général, vous vous êtes attachée
à le démontrer.
Les femmes peuvent tout faire. La seule condition, c'est de
le vouloir.
…encore faut-il le vouloir. Et cela n'est pas simple. Cela
n'est pas évident. Cela l'était encore moins hier
qu'aujourd'hui. Mais cela l'est encore trop peu.
Dans trop de pans de notre société, le poids des habitudes,
du conformisme pousse les femmes à ne pas oser, à croire
qu'elles n'ont pas le droit de vouloir.
Bien sûr, on peut réussir quand on est une femme. Mais il
faut infiniment plus de ténacité, plus de détermination, et
plus d'acharnement que lorsqu'on est un homme.
La voilà, l'injustice. Le voilà, le combat qu'il nous faudra
mener, sans relâche, tant que les femmes n'auront pas les
mêmes chances d'oser, les mêmes chances de vouloir que les
hommes.
Nous continuerons.
Nous le devons aux pionnières. Aux battantes. A toutes
celles qui ont montré la voie. Qui ont montré que oui, c'est
possible. Mais que cela demande beaucoup, beaucoup plus
d'efforts.
Nous continuerons ce combat car nous vous le devons, madame
le Général.
(Texte intégral du discours de
Jean-Baptiste Djebbari - Ministre délégué chargé
des transports) |